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CONAPEDE Le concept de nature à l'épreuve de l'éducation au plein air

Dates

Septembre 2023 - Janvier 2025

Thématique

Education en plein air, action collaborative, concept de nature, interdisciplinarité

Niveau d'enseignement concerné

Tous

Mots clés

Dans le débat sur les questions environnementales et dans de nombreuses appropriations de la pédagogie du plein air, on s’interroge peu sur ce que l’on entend par “nature”, ignorant souvent que ce concept a une longue histoire et de nombreuses significations.

Selon Descola (2005), il s’agit d’une construction sociale de l’Occident moderne qui reflète une cosmogonie largement isolée des autres visions du monde. Selon lui, nous devrions apprendre à nous positionner “au-delà de la nature et de la culture”. Que recouvre ce terme de “nature” dans les différentes pratiques des pédagogies de plein air ? S’agit-il de l’espace végétal hors de l’environnement urbain, hors des bâtiments scolaires ? Qu’est-ce que la nature par rapport aux êtres humains, aux élèves ? Comme le souligne Delepière (2023), ” en tension avec de multiples prismes comme la divergence entre nature et culture (Descola, 2005), la question de la place historique de l’humain dans la pensée commune et philosophique est débattue : l’homme domine-t-il la nature ? La culture est-elle supérieure à la nature ? L’homme est-il en dehors de l’écosystème ?

Selon les philosophes Bruno Latour (2004), Isabelle Stengers (2019), Catherine et Raphaël Larrère (2022), ces tensions épistémologiques et sociétales cachent des enjeux cruciaux en termes de positionnement environnemental et politique.

Dès lors, plusieurs questions se posent. Le concept de nature est-il investi politiquement par les acteurs de terrain (enseignants et élèves) et, si oui, dans quelle perspective ? En particulier, la nature est-elle perçue et comprise comme un “champ de bataille” du point de vue de l’écologie politique et sociale ? (Keucheyan, 2014/2018). Quel type d’apprentissage de la citoyenneté les écoles de plein air favorisent-elles et sur quel modèle d’expérimentation sociale s’alignent-elles ? Correspondent-elles à un projet politique spécifique et identifiable ? Au-delà de la reconnexion avec la ” nature ” et du dépassement des frontières disciplinaires, les pédagogies de plein air visent-elles à transformer notre rapport à la production, à la propriété privée, ou encore aux droits et à leurs sujets ? Si oui, comment ? Si non, pourquoi ?

Contexte du projet

Les discours alarmistes sur l’Anthropocène et le changement climatique façonnent aujourd’hui notre rapport au monde. De nombreux travaux de recherche analysent ces eschatologies contemporaines (Chelebourg, 2012). En réponse, poussés par leur mission d’éduquer les citoyens de demain, les établissements d’enseignement s’engagent de plus en plus dans les questions environnementales, souvent par des activités à l’intérieur de la salle de classe utilisant la pédagogie traditionnelle pour sensibiliser au sujet. Parfois, et plus fréquemment, ils expérimentent de nouvelles formes de pédagogie. Ainsi, sous les termes d'” éducation par la nature “, d'” école de plein air “, d'” éducation en plein air ” ou encore d'” école de la forêt “, pour ne citer que quelques mouvements, les initiatives autour de l’éducation en plein air se multiplient en Europe depuis une dizaine d’années, tant dans les écoles (Chereau & Fauchier-Delavigne, 2019) que dans les études scientifiques (Ayotte-Beaudet & Potvin, 2020 ; Acheroy, Leterme & Faniel, 2020).

Plusieurs arguments sont avancés pour justifier cet enthousiasme : les liens positifs directs entre l’éducation en plein air et la créativité, la collaboration ou la concentration des élèves (Ariena, 2019), qui remettent en cause de nombreuses normes au sein du système scolaire ” traditionnel ” ; une corrélation positive avec l’enseignement des sciences ; le ” nature deficit disorder ” dans la société en général et chez les jeunes en particulier, et enfin, la nature souvent intrinsèquement interdisciplinaire de ces approches pédagogiques. Quelle est la réalité de cette interdisciplinarité, comment se traduit-elle et quels en sont les résultats sur les apprentissages ? En quoi les pratiques de plein air interrogent-elles le rapport à l’institution scolaire et les caractéristiques du système de scolarisation ? Au-delà de l’institution scolaire, ces pédagogies permettent-elles de reconsidérer l’ordre libéral, qu’il s’agisse de la propriété (Vanuxem, 2018 ; Crétois, 2023), des modes de production (Illich, 1973 ; Gorz, 1975 ; Tordjman, 2021), ou des (sujets de) droits ? Quel apprentissage de la citoyenneté ces pratiques favorisent-elles ? Telles sont les questions qui retiendront notre attention et constitueront le cœur de nos investigations dans le cadre de cette recherche-action collaborative.

Objectifs du projet

Cette recherche-action collaborative vise tout d’abord à améliorer notre compréhension des pratiques pédagogiques “dans” et “avec” la nature. Plus précisément, notre recherche se concentre sur la compréhension par les acteurs de terrain du concept de ” nature ” dans les ” pratiques de plein air “, en considérant les différentes controverses philosophiques et épistémologiques autour de ce concept. C’est donc avec des enseignants volontaires de Marseille et de Bruxelles que nous souhaitons interroger cette notion de nature et, par ailleurs, produire, expérimenter et évaluer des approches pédagogiques et didactiques interdisciplinaires en collaboration avec eux.

Cette recherche transnationale a donc trois objectifs principaux :

(1) Le premier objectif est de problématiser, à travers une analyse des controverses dans divers champs disciplinaires, la manière dont les acteurs sur le terrain appréhendent le concept de “nature” dans les pédagogies de plein air, afin d’identifier ses implications politiques, sociales et philosophiques.

(2) Le deuxième objectif est de co-construire des approches pédagogiques et didactiques interdisciplinaires évolutives sur le concept de “nature” pour plusieurs niveaux scolaires.

(3) Enfin, l’objectif est de former les enseignants en les soutenant dans l’expérimentation et l’évaluation de nouvelles approches pédagogiques et didactiques.

Perspective méthodologique

Dans cette perspective, nous souhaitons expérimenter, avec des chercheurs, des formateurs et des acteurs de terrain intéressés par l’éducation de plein air, des communautés de pratique au sens de Duncan-Andrade et Morrell (2008), pour qui il s’agit de groupes de personnes qui partagent une préoccupation ou une passion commune pour quelque chose qu’ils font et qui interagissent régulièrement pour apprendre à mieux le faire. L’objectif est de proposer une approche qui favorise une réflexion critique et constructive sur les pratiques éducatives par le biais d’un processus cyclique composé de 5 étapes qui, par une remise en question permanente, contribuent à des changements sociaux ou éducatifs positifs.

Plus précisément, l’objectif est de produire, tester et évaluer des approches pédagogiques avec des enseignants volontaires de Marseille et de Bruxelles, sur la base d’une recherche collaborative (Bourassa et al., 2007 ; Van Nieuwenhoven & Colognesi 2015 ; Desgagné, 1997).

La communauté de praxis critique ainsi formée aura la particularité de produire des effets à deux niveaux : la construction de nouvelles connaissances et le développement professionnel du participant. L’intérêt réside également dans l’impact que les participants peuvent avoir sur leurs collègues, qui bénéficient des nouvelles ressources apportées par le participant. Pour favoriser ces bénéfices, il faut établir une interrelation entre les conditions nécessaires au fonctionnement du groupe (notamment des relations symétriques et des responsabilités partagées) et le processus de travail à mettre en œuvre (co-construction entre les partenaires, reconnaissance de l’expertise de chacun, sentiment de reconnaissance). Ainsi, un climat de confiance et de bien-être propice aux échanges peut s’instaurer et générer des bénéfices perçus par tous les acteurs.

Concrètement, des réunions entre les différents acteurs de ce partenariat de recherche seront organisées au cours de l’année 2023-2024 : à la fois à distance et en face-à-face aux niveaux national et transnational.

Leaders du projet

  • DELEPIERE Maud Delepiere (Université Libre de Bruxelles)

  • NAFTALI Patricia (Université Libre de Bruxelles)

  • ROLAND Elsa (Université Libre de Bruxelles)

Autres partenaires

  • LERAY Morgane (Aix-Marseille Université)
  • VOTTERO Eric (Aix-Marseille Université)
  • HE2B Defré

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